الأربعاء، 25 يناير 2012

Mohamed Abed Al-Jabri





Décès du philosophe Mohamed Abed
Al-Jabri

Par RFI

Le philosophe marocain Mohamed Abed Al-Jabri, l’un des spécialistes de la pensée arabo-musulmane, est décédé lundi à Casablanca à l’âge de 75 ans. Mohamed Abed Al-Jabri avait été l’un des dirigeants de l’Union socialiste des forces populaires (USFP, coalition gouvernementale).Comment définir une pensée arabe contemporaine ? Toute sa vie Mohamed Abed Al-Jabri aura réfléchi à cette question.Prenant le contre-pied d’une pensée orientale mystique, il défend l’idée que la raison et l’islam ne se contredisent pas. Dans une trentaine d’ouvrages dont le plus connu est sa « Critique de la raison arabe », le philosophe n’aura cessé d’étayer cette thèse d’un rationalisme arabe.Le philosophe Mohamed Abed Al-Jabri n’en n’était pas moins engagé ; il est l’un des créateurs et dirigeants du parti socialiste marocain jusqu’au début des années 80. Et c’est parce que l’intellectuel n’a jamais dissocié sa pensée de l’action qu’après les attentats du 11-Septembre, Al-Jabri décide de reprendre la plume. Il veut offrir une vision plus éclairée de l’islam et entame pour cela une explication du texte coranique.
Au Maroc le texte est descendu en flêche par les islamistes mais dans le reste du monde arabe, il fait figure de référence pour beaucoup.

Mohamed Abed Al-Jabri venait de Figuig dans l’extrême sud-est du pays, tout près de la frontière algérienne. D’abord instituteur, le jeune homme poursuit ses études pour devenir professeur de philosophie à l’université de Rabat. Jusqu’au bout, il aura enseigné et écrit. Son dernier ouvrage « La compréhension du coran » a été publié il y a à peine deux ans.

TRAJECTOIRE ET PENSEE
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Né en 1935, dans un milieu modeste, à Figuig dans le sud-est du Maroc, Al-Jabri obtint un diplôme d’études supérieures en philosophie, en 1967 et débuta une riche carrière académique à l’Université de Rabat, en tant que professeur de philosophie générale et d’épistémologie. Sa thèse sur Ibn Khaldün (La pensée d’Ibn Khaldoun : les grandes lignes d’une théorie Khaldounienne de l’histoire musulmane) lui inspira l’entreprise d’un énorme travail de refondation de la pensée arabo-musulmane.

Ses premières recherches le menèrent à la critique des problèmes éducatifs et intellectuels au Maroc et dans le monde arabe. En 1980, il produit un livre culte consacré à la critique du patrimoine culturel arabe (Nous et le Patrimoine), et c’est en 1984 qu’Al-Jabri entame la publication de son ouvrage de référence, consacré à « la critique de la raison arabe », sous quatre angles d’approche : la formation des systèmes cognitifs de la raison arabe, la structure de la raison arabe, la raison politique arabe et la raison éthique arabe. Annonçant l’objet de cette œuvre, inédite dans le monde arabo-musulman et traduite en plusieurs langues, Al-Jabri s’exprimais, en février 1983, en ces termes :

« Le sujet traité [dans cet ouvrage] devait être abordé depuis un siècle. La critique de la raison est une partie primordiale et préalable à tout projet de renaissance. Mais notre renaissance arabe contemporaine s’est déroulée autrement et c’est probablement l’une des principales raisons de son échec qui perdure à nos jours. Peut-on construire une renaissance sans une raison renaissante ? [sans] une raison qui n’a pas revu de manière globale ses outils, ses concepts, ses projections et ses visions ? ».

Al-Jabri a légué une quarantaine d’ouvrages, aussi riches que diversifiés, et une revue fort méthodiquement critique (au sens épistémologique du terme) de près de 1500 ans d’histoire tumultueuse de la pensée arabo-musulmane. Ses œuvres furent toujours un plaidoyer en faveur d’un rationalisme ouvert et enraciné. Al-Jabri eut notamment le mérite d’analyser, méthodiquement et avec beaucoup de pertinence, l’opposition objective entre la tradition mystique et illuministe orientale incarnée par Avicenne (980-1037) et le rationalisme musulman occidental incarné par Averroès (1126-1169). Dans sa « critique de la raison arabe », il diagnostiqua le déclin de la pensée arabe moderne et précisa les raisons qui l’ont fait vivre en marge de l’histoire, faute d’avoir su s’approprier la pensée d’Averroès dont l’influence fut, en revanche, considérable sur la philosophie européenne occidentale.

Al-Jabri fut également un militant politique, de gauche, avant de se retirer du bureau politique du parti socialiste marocain, en 1981, et se consacrer à l’écriture. Concluant son livre sur la critique de la raison politique arabe, il affirme :

« L’instauration d’un régime constitutionnel démocratique et moderne permet effectivement d’implanter la modernité politique et son enracinement. Cependant la raison politique n’est pas seulement régie par le type du régime de gouvernement et ses articles constitutionnels, mais principalement par des déterminants, sociaux, économiques et culturels. En ce qui concerne la raison politique arabe, le renouvellement de ses trois déterminants (la tribu, le butin et le dogme) est une condition nécessaire pour la hisser au niveau où elle sera à même de répondre aux exigences de la renaissance et du progrès dans le monde contemporain.

Ce renouvellement des déterminants de la raison politique arabe ne peut être accompli sans s’employer à leur négation historique, tout en les substituant par des déterminants historiques modernes. D’où la nécessité d’une critique à la fois du passé et du présent. La critique du présent, avec tout ce qu’il a hérité du passé, est le premier pas de tout projet prospectif. Et comme le passé et le présent chez [les arabes] ne se dissocient pas, que ce soit à l’échelle de notre conscience ou de notre réalité, il faut donc les critiquer tous les deux, critiquer ce qui fonde, consciemment ou inconsciemment, la raison politique dans le passé et dans le présent : la tribu, le butin et le dogme. »
Prix et récompenses.

Al-Jabri reçut plusieurs prix arabes et internationaux, dont celui de Bagdad pour la culture arabe (1988), le Prix maghrébin de la culture (Tunis, 1992), le Prix des commandeurs (Fondation de la pensée arabe) (Beyrouth, 2005), la médaille Avicenne de l’Unesco (2006) et le prestigieux prix de la fondation Averroès pour la pensée libre (2008).

Mais il lui arriva aussi de refuser de nombreux prix, dont le prix Saddam Hussein à la fin des années 1980 (100 000 $US) et le prix du colonel Kadhafi en 2002 (32 000 $US).
http://www.lepost.fr/article/2010/05/06/2063126_l-auteur-de-la-critique-de-la-raison-arabe-le-philoso phe-marocain-mohamed-abed-jabri-est-decede-a-l-age-de-75-ans.html

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